Stéphane LE ROY, Économiste de la construction est membre de l’ECCQ certifié AEÉCQ (Québec-Canada) et de l’Untec (Membre GT BIM UNTEC). Il exerce depuis 22 ans dont 13 ans en France, dans des équipes de maîtrise d’œuvre pluridisciplinaires et sur tous types de projets. Au Québec, il intervient auprès des maîtres d’ouvrages en collaboration avec des confrères économistes.
Votre vision de la maquette numérique ?
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De quelle manière, l’accès à une maquette numérique 3D a changé vos approches « métier » ?
Je ne parlerai pas d’une seule maquette mais de plusieurs maquettes numériques pluridisciplinaires. En tant qu’économiste de la construction, mon rôle est transversal. Ainsi je suis concerné par toutes les maquettes (ARC, STR, PB, CVC, EL, VRD, …).
Avant je quantifiais en 3D sans le montrer, sur la base de plans et coupes en 2D. Aujourd’hui, je visualise et collabore avec tous les acteurs, je renseigne et importe les quantités en 3D, les vérifie et complète avec les ouvrages non modélisés mais nécessitant un article dans les DPGF (Exemples : installation de chantier, échafaudage, réservations, socles, …).
Je suis impliqué plus en amont des projets. Les 3D sont des aides à la décision que je challenge avec les BET et l’Architecte, tant au niveau des quantités que des prestations technico/économiques. Cette transparence inspire confiance également aux entreprises. Cela se retrouve dans les CCTP, les DPGF, les rendus 3D voire des maquettes ECO au format IFC.
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Quels changements ont été nécessaires dans votre cabinet (structures, équipements, formations…) ?
Je n’ai pas eu beaucoup de changements à opérer, car je travaillais déjà en 3D et importais mes données modélisées dans mon logiciel d’économiste.
Mon immigration au Québec en 2007 a bousculé toutes mes habitudes. Je me suis retrouvé dans une autre réalité et suite à une collaboration avec un économiste québécois, j’ai travaillé sur différentes opérations dans un contexte de BIM naissant au Canada. J’ai dû m’impliquer davantage. J’ai assisté à des présentations, suivi des formations au Québec et en France.
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Comment exploitez-vous la maquette pour rédiger les CCTP et générer un appel d’offre ?
J’utilise plusieurs logiciels mais les principaux sont Allplan (Cao), Mensura (Vrd) et DeviSOC (Chiffrage).
La bibliothèque datBIM est connectée au logiciel DeviSOC.
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Comment faites-vous pour alimenter la maquette avec les données indispensables au DOE numérique et à l’exploitation ?
Via mes logiciels capables d’exporter en IFC.
Les maquettes IFC-ECO auxquelles je faisais référence, incluent des descriptifs dans les propriétés des objets. Ceux-ci proviennent des chaînages opérés avec les bibliothèques du projet.
La précision des informations dans le modèle résulte du libellé des chaînages et des compléments d’informations saisis.
DeviSOC offre un accès facilité à datBIM, permettant d’alimenter les CCTP de caractéristiques génériques et/ou des marques, suivant que l’on est en marché public ou privé.
Au stade de l’exploitation, les données indispensables du DOE numérique, peuvent être complétées par des marques et/ou des liens vers les fiches produits et/ou les CCTP.
Projets BIM ?
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Comment se déroulent vos premiers projets BIM ?
La démarche BIM est trop souvent associée à la 3D (modèle virtuel), alors qu’il y a la 4D (temps), la 5D (coût), le 6D (développement durable), la 7D (l’exploitation).
On parle de BIM mais de quel BIM, quel niveau de maturité 1 (modélisation orientée objet), 2 (Collaboration orientée objet) ou 3 (Idéal à atteindre avec base de données en co-modélisation multidisciplinaire).
Pas encore obligatoire, cette démarche est souvent volontaire et nécessite d’être pro-actif au sein de l’équipe de maîtrise d’œuvre mais également des maîtres d’ouvrage et des entreprises.
Jusqu’à il y a deux ans, je considère que je pratiquais du BIM de maturité 1. Actuellement la quasi-totalité de mes projets est en niveau 2.
La collaboration et l’interopérabilité, valorisent et responsabilisent les acteurs et permettent de limiter les risques et de gagner en qualité.
De nouvelles opportunités de missions, associées à cette montée progressive de compétences apparaissent et j’ai le sentiment de n’en être qu’au début.
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datBIM vous a-t-il permis d’être plus efficace sur ces derniers ?
La bibliothèque datBIM s’enrichit chaque jour, ce qui la rend de plus en plus incontournable. De plus les filtres multicritères techniques permettent d’aller à l’essentiel, ce qui facilite considérablement mes recherches de produits et fournisseurs.
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Comment voyez-vous le développement du BIM en France, au Québec ?
Le Québec était en avance en 2008 mais depuis la remise du rapport en décembre 2014 de Bertrand DELCAMBRE (PTNB Plan de Transition Numérique du Bâtiment), les choses se sont accélérées en France.
En 2016, je constate que la France et le PTNB sont sur la bonne voie. Ils traitent les méthodes organisationnelles, les niveaux de représentation graphique, la gestion et le transfert des données du projet, ainsi que les processus, les usages et l’environnement collaboratif du BIM.
Les conventions traitent également des aspects juridiques des contrats notamment en ce qui concerne la propriété intellectuelle et les conditions d’utilisation par le maître d’ouvrage des données numériques issues du processus BIM.
La courbe du développement du BIM est exponentielle. Tout comme il y a seulement 9 ans, les entreprises n’avaient pas internet. Les tablettes ont émergé il n’y a que 3 ans. Et que dire des drones, des lunettes immersives, du cloud, des plateformes collaboratives…
Si ce n’est que toutes ces avancées technologiques et numériques, serviront la démarche BIM.
On n’arrête pas le progrès numérique !
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Auriez-vous des exemples de projets sur lesquels vous avez travaillé en BIM ?
J’ai travaillé sur plusieurs projets emblématiques :
- La Tour panoramique du Parc des Oiseaux (Villars les Dombes – 01) en collaboration avec Pierre Barillot Architecte, COGECI Structures, B3E Fluides. Le défi était le budget comme souvent, mais surtout le délai, qui était conditionné par le passage du Tour de France 2016. Sans le travail collaboratif nous n’aurions pas atteint nos objectifs. Le budget était de 1 Million d’euros TTC de travaux avec des contraintes considérables : hauteur de 26,4 m pour la dernière plateforme, 176 marches, 446 m2 de planchers, 50 tonnes d’acier, 2 ascenseurs PMR en gaines préfabriquées, 4 mois de chantier incluant les périodes de préparation et de réception.
- Le nouveau siège social LDLC à Limonest (69)
- Le restaurant d’entreprise et les Bureaux de Valrhona à Tain (26)
- Récemment, pour la Communauté de Communes des Pierres Dorées, il s’agissait d’une réhabilitation et extension de bureaux avec l’Agence d’architecte 2BR.
Ces opérations ont servi d’expérimentations BIM. Nous sommes maintenant prêt à répondre aux demandes des Maitres d’Ouvrages qui recherchent des équipes respectant des chartes et conventions BIM.
Votre avis sur datBIM ?
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En quoi l’usage de datBIM vous aide dans l’exploitation de la maquette ?
En tant qu’économiste de la construction, la bibliothèque connectée datBIM (norme PPBIM) qui centralise les données produits de tous les corps de métiers, m’aide dans la rédaction de mes CCTP.
Les informations principales sont également intégrées dans les propriétés des objets de la maquette numériques, et le fait d’utiliser un catalogue structuré et harmonisé me fait gagner un temps précieux
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D’après-vous quels sont les atouts de la plateforme datBIM ?
Elle est OPEN BIM donc gratuite.
Elle est simple d’utilisation et permet de trouver efficacement des produits via des filtres et critères adaptés aux recherches.
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Quelles seraient vos remarques pour améliorer le service ?
Il faut continuer à développer des plugin avec le plus grand nombre de logiciels métiers pour que datBIM soit utilisable par tous les acteurs.
Pour moi, il est important d’accéder à des objets génériques pour la rédaction des CCTP mais également pour disposer de propriétés d’objets des maquettes numériques dès la phase DCE.
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Recommanderiez-vous datBIM à un collègue ou un homologue ?
Sans hésiter, je recommanderai datBIM à mes confrères français mais également aux architectes et bureaux d’études.